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Uber Maroc
10.07.2022 à 16 H 59 • Mis à jour le 17.08.2022 à 16 H 51 • Temps de lecture : 33 minutes
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Uber Files : Comment Uber a raté son créneau au Maroc

RECIT-ENQUÊTE Arrivée en 2015 au Maroc, la société de VTC a rapidement déchanté face à l’opposition du ministère de l’Intérieur et des chauffeurs de taxis. Barrage qui l’a conduit à quitter le Royaume en 2018. Le Desk, associé à l’enquête mondiale « The Uber Files » révèle, sur la base de documents inédits, comment la mauvaise stratégie du géant américain l’a mené à l’échec, avant son retour via la marque Careem

« La police est toujours du côté des taxis ». C’est en ces termes que l’ex-directrice générale d’Uber Maroc, Meryem Belqziz, s’est exprimée le 4 décembre 2015 dans une boucle de mails comprenant une douzaine de haut-cadres de la direction régionale MENA de la firme américaine. Un aveu d’impuissance alors qu’était entamée une énième grève des chauffeurs de taxis de Casablanca décidés à bouter la société californienne de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC) hors de leur ville.


Une opposition radicale vécue par la multinationale américaine dans le principal pôle économique du pays alors qu’elle avait adopté au Royaume sa stratégie d’entrisme pourtant rodée ailleurs avec plus ou moins de succès : débarquer au pays visé, déployer son service, attirer des clients, se faire une place et puis enfin négocier à postériori avec le gouvernement local, ayant finalement une faible marge de manœuvre.


Une stratégie à laquelle le Maroc n’a pas échappé : pour s’installer à Casablanca, la firme de VTC n’a pas eu à nouer dans un premier temps de contacts avec les autorités locales. Son lancement officiel durant l’été 2015 n’avait cependant pas manqué de s’attirer immédiatement les foudres de la préfecture du Grand Casablanca. Un sévère communiqué de la wilaya avait déclaré les services d’Uber illégaux.


Moins de trois ans plus tard, la multinationale claquera la porte du Maroc et pointera du doigt « l’incertitude réglementaire actuelle (qui) ne nous permet pas de fournir une expérience sûre et fiable ».


À l’époque très peu d’informations avaient filtré sur l’aventure avortée d’Uber dans le pays, les détails des péripéties ayant mené à son éviction étant demeurés inconnus. Quelles ont été les relations entre Uber et les autorités locales  ? Y-a-t-il eu des tentatives d’apaiser la situation ? À qui la faute, au Maroc laissant planer le doute sur sa réglementation ou à Uber, opaque dans sa communication et flibustier dans ses rapports avec les autorités comme on a pu le voir sous d’autres cieux, notamment en France à la même période ?


« Qui paye l’enquête ? »

Dans cette enquête exclusive, Le Desk revient sur ces quelques années de présence de la multinationale au Maroc. 124 000 documents dont 83 000 emails récupérés par le journal britannique The Guardian, et partagés avec le Consortium International des Journalistes d’Investigation (ICIJ) et ses partenaires, dont Le Desk, permettent aujourd’hui de lever le voile sur la stratégie adoptée par Uber au Maroc, ses relais, et surtout son incapacité à appréhender la situation politique, économique et sociale dans le pays.


Les documents à notre disposition sont composés essentiellement de mails, de SMS mais aussi de notes confidentielles commandées par Uber au cabinet d’influence marocain recruté pour l’occasion : Public Affairs &  Services (PASS), dirigé par le lobbyiste Hatim Benjelloun. Pour notre enquête, celui-ci a accepté de répondre à nos questions dans le cadre d’un entretien. Ce qui n’a pas été le cas de l’ex-dirigeante d’Uber au Maroc, Meryem Belqziz, ayant refusé de s’entretenir avec Le Desk. Après avoir accepté dans un premier temps, elle reviendra nous affirmer : « Je ne pourrais finalement pas répondre à vos questions », avant de nous lancer un très maladroit : « Qui paye l’enquête ? ».


Des diplomates américains offrent leur assistance

Octobre 2014. Uber est encore loin d’avoir commencé à déployer sa filiale marocaine, et encore moins à recruter. Pourtant, l’information de son débarquement imminent commence à filtrer. Elle arrive aux oreilles d’employés de l’antenne du département américain du Commerce installée au Consulat général des États-Unis de Casablanca.


Les deux cadres, Thanae Bennani et Douglas Wallace, prennent alors attache avec le management d’Uber, dont notamment Joanne Kubba, la directrice du département Public Policy de la région MENA pour Uber et dont les bureaux sont logés à Dubaï. La proposition est simple et directe : « Nous serions heureux de vous aider dans notre région. Je suis un natif de San Fran vivant à Casablanca, un grand fan et utilisateur d'Uber aux États-Unis, et je pense qu'Uber pourrait être un grand succès au Maroc. Je vous contacte simplement pour vous proposer de l'aide si vous en avez besoin ! », propose l’un d’eux. Le message intervient en marge de l’édition 2014 de l’évènement Global Entrepreneurship Summit se tenant à Marrakech.


Après quelques échanges, le verdict est sans appel du côté d’Uber. Mark MacGann, lobbyiste en chef de la compagnie américaine pour la région avertit sa collaboratrice Kubba, en transférant les mails des fonctionnaires américains : «  AVERTISSEMENT : le consensus au sein de la Policy Team (en direct du Panama !) est que le département américain du Commerce est généralement une perte de temps. Il faut les écouter certainement, mais il ne faut pas se mettre d’accord sur les éléments d'action. Tu es prévenue :)  », fait-il savoir.

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Par @soufianesbiti
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